La croissance économique joue un rôle semblable à celui du cœur dans un organisme vivant : elle alimente tous les autres organes de l’économie — emploi, investissement, services publics, consommation. Lorsqu’un pays connaît une croissance soutenue, cela signifie généralement que les entreprises tournent, que les ménages consomment, que l’État dispose de marges pour investir, et que l’avenir s’annonce plus stable. À l’inverse, une croissance faible ou erratique expose à l’instabilité sociale, aux déficits budgétaires, à la précarité de l’emploi. C’est pourquoi les projections économiques, en particulier celles du FMI, sont scrutées de près : elles orientent les politiques nationales, influencent les décisions des investisseurs et conditionnent les stratégies des bailleurs de fonds internationaux.
L’Algérie au-dessus de la moyenne régionale
Parmi les pays de la région MENA, un acteur attire particulièrement l’attention du FMI : l’Algérie. Alors que la croissance moyenne des pays de cette zone est désormais attendue à 2,6 % pour l’année 2025 — une nette révision à la baisse par rapport aux 4 % envisagés il y a peu — Alger tire son épingle du jeu. Le FMI prévoit une croissance de 3,5 % pour le pays nord-africain, soit une révision haussière de 0,5 point par rapport à ses prévisions d’octobre 2024. Ce signal encourageant contraste avec les perspectives plus ternes des autres États exportateurs de pétrole, qui devront se contenter d’une croissance de 2,3 % en 2025.
Ce dynamisme relatif repose sur plusieurs facteurs : la résilience de l’économie algérienne malgré les fluctuations des cours du pétrole, les efforts de diversification économique amorcés ces dernières années, ainsi qu’une stabilité budgétaire encore maîtrisée. Même si les hydrocarbures continuent de jouer un rôle structurant dans l’économie nationale, les marges de manœuvre semblent s’élargir, permettant au pays de mieux absorber les chocs extérieurs.
Une dynamique à relativiser dans un climat régional incertain
Cependant, la performance algérienne ne doit pas masquer le contexte dans lequel elle se développe. Le FMI prévoit que l’ensemble des pays producteurs de pétrole connaîtront un rebond limité en 2026, avec une croissance qui plafonnera à 3,1 %, un rythme qui reste en deçà des ambitions exprimées dans de nombreuses capitales. Cette tendance pourrait s’expliquer par une série de contraintes persistantes : pressions inflationnistes, incertitudes géopolitiques, et ajustements budgétaires en cours dans plusieurs États.
Pour l’Algérie, ces chiffres doivent donc être lus avec prudence. Une croissance de 3,5 % est certes honorable, mais elle reste fragile. Elle ne signifie pas encore une transformation structurelle de l’économie, ni un décollage durable. Il s’agit plutôt d’un signal positif, un point d’appui pour consolider les réformes engagées. Le véritable défi réside dans la capacité à maintenir ce cap au-delà de l’effet conjoncturel de 2025.
Une fenêtre d’opportunité pour transformer l’essai
À l’échelle nationale, cette prévision peut être perçue comme une invitation à accélérer les transformations. Une croissance robuste donne des marges de décision : pour stimuler l’emploi des jeunes, pour moderniser les infrastructures, pour renforcer les filets sociaux. Dans une région où les perspectives sont souvent contrastées, disposer d’un levier de croissance supérieur à la moyenne devient un atout politique et économique de poids.
L’Algérie pourrait ainsi jouer un rôle de moteur au Maghreb si elle capitalise intelligemment sur cette dynamique. Cela passe par la consolidation des secteurs non pétroliers, une meilleure inclusion financière, et un soutien actif à l’innovation locale. En somme, faire de cette embellie conjoncturelle le tremplin d’un véritable renouveau économique.
Le FMI, en relevant ses prévisions, envoie un message de confiance. Il revient désormais aux décideurs algériens de transformer cette prévision chiffrée en progrès tangibles pour les citoyens. Car une croissance ne vaut que par ce qu’elle permet de construire : une société plus équitable, un marché plus attractif, et un avenir moins incertain.