Alors que le conflit en Ukraine, déclenché en 2022, continue d’opposer les forces russes aux troupes ukrainiennes, Moscou s’apprête à organiser un événement d’envergure. Ce 9 mai, la Russie célèbre les 80 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Une date à haute valeur symbolique pour le Kremlin, d’autant plus que près de trente chefs d’État et de gouvernement sont attendus dans la capitale. Ce rassemblement diplomatique inédit depuis le début des hostilités renforce les préoccupations sécuritaires au sein de l’appareil d’État russe.
Un ciel saturé de batteries antiaériennes
Le renforcement des dispositifs de défense autour de Moscou ne passe pas inaperçu. Plusieurs centaines de systèmes antiaériens ont été positionnés non seulement dans la région de la capitale, mais également dans le tissu urbain lui-même. Des installations sont désormais visibles au sommet de bâtiments administratifs, sur les toits d’immeubles et dans des zones jusqu’alors non militarisées.
Ce quadrillage défensif s’inscrit dans une volonté claire : éviter toute perturbation durant le défilé du 9 mai. Face à une situation militaire qui reste instable en Ukraine et à une multiplication des actes de sabotage présumés sur le sol russe, les autorités ont opté pour une protection maximale. Cette présence militaire dans l’espace public, visible jusque dans les quartiers résidentiels, illustre une logique d’anticipation assumée par le Kremlin.
Des présences étrangères qui redessinent les équilibres
Le format de cette commémoration tranche avec les éditions précédentes. La Russie, en quête de partenaires fidèles dans un contexte de sanctions et d’isolement diplomatique en Europe, met en scène sa capacité à mobiliser un réseau d’alliés. La présence annoncée des présidents chinois et brésilien, Xi Jinping et Lula, aux côtés de dirigeants venus du Moyen-Orient, d’Afrique, d’Asie centrale et d’Amérique du Sud, confère au défilé une portée géopolitique nouvelle.
Au-delà de l’aspect protocolaire, ce rassemblement traduit une stratégie de repositionnement international. En accueillant des chefs d’État issus de régions souvent marginalisées dans les équilibres traditionnels du pouvoir mondial, Moscou tente de démontrer qu’elle conserve une influence bien au-delà de ses frontières immédiates. Le Jour de la Victoire devient ainsi un moment de légitimation politique, où les alliances alternatives sont mises en lumière.
Une ville placée sous surveillance technologique
Pour accompagner ce dispositif exceptionnel, les autorités ont restreint les connexions mobiles à Moscou, affectant de nombreux services numériques. Distributeurs de billets, terminaux de paiement et plateformes de communication ont subi des interruptions temporaires. Ce verrouillage du réseau a été justifié par la volonté d’empêcher toute perturbation potentielle liée à l’organisation de l’événement.
Cette mesure, inhabituelle mais assumée par les responsables russes, s’ajoute aux dispositifs physiques déjà en place. Elle illustre une autre facette du contrôle exercé par le pouvoir : celui du numérique, devenu un espace sensible en période de tension. En combinant dissuasion militaire et maîtrise des flux d’information, le Kremlin entend garantir une commémoration sans incident, tout en projetant une image de stabilité auprès de ses partenaires présents sur place.
Ce 9 mai, Moscou espère montrer plus que sa capacité à se souvenir : sa faculté à rassembler, à contrôler et à persister malgré les lignes de fracture qu’a révélées la guerre en Ukraine.