Évoqué depuis plusieurs décennies, le projet de tunnel entre le Maroc et l’Espagne refait surface avec une intensité nouvelle. Il s’agit d’une liaison ferroviaire sous-marine qui traversera le détroit de Gibraltar, reliant les villes de Tanger et d’Algésiras. Prévu pour s’étendre sur 60 kilomètres, dont 28 kilomètres immergés sous la Méditerranée, ce tunnel est appelé à devenir une infrastructure stratégique au carrefour de deux continents. À la croisée des enjeux économiques, humains et géopolitiques, cette œuvre titanesque vise à rapprocher l’Afrique et l’Europe, en facilitant les échanges de biens et la mobilité des personnes. Son ambition dépasse la simple prouesse technique : il s’agit d’un vecteur d’intégration régionale et d’ouverture à de nouvelles dynamiques de coopération.
Portée conjointement par le Maroc, l’Espagne et l’Union européenne, cette initiative connaît actuellement une phase d’accélération marquée par la réalisation de deux études fondamentales. La première, confiée à Herrenknecht Ibérica, porte sur l’analyse des sols du seuil de Camarinal, élément clé pour définir la méthode de forage à adopter. En parallèle, une seconde étude, conduite par la Marine espagnole, s’intéresse à la sismicité de la zone, grâce à une surveillance qui s’étendra sur une période de six mois. Les résultats sont attendus pour septembre 2025 et permettront de préciser les contours techniques du chantier.
Trois galeries sont envisagées dans le cadre de cette future infrastructure : une dédiée aux passagers, une autre aux marchandises et une troisième ferroviaire. Un premier tronçon bidirectionnel est prévu, avec la perspective d’une extension à double sens. Cette configuration devrait renforcer considérablement la fluidité des échanges entre les deux rives du détroit. En comparaison, la partie immergée du tunnel dépassera de près de 10 kilomètres celle de l’Eurotunnel, reliant la France au Royaume-Uni.
L’impact économique attendu est considérable. Outre la réduction des coûts de transport et de logistique, ce corridor favorisera l’essor du commerce intercontinental. Il participera également à densifier les flux humains, en facilitant les déplacements entre les populations africaines et européennes. Ce projet d’envergure, évalué à plus de 15 milliards d’euros, est partiellement financé par des fonds déjà mobilisés pour les premières étapes, démontrant l’engagement concret des partenaires.
Avec une mise en service envisagée à l’horizon 2040, le tunnel sous le détroit de Gibraltar s’inscrit dans une dynamique de long terme. Il illustre une volonté affirmée de créer une infrastructure durable, à forte valeur ajoutée pour l’intégration régionale. Les mois à venir seront décisifs pour confirmer la faisabilité technique et renforcer l’adhésion autour de ce chantier emblématique.