Depuis plusieurs années, Pékin multiplie les initiatives pour renforcer ses liens économiques avec les pays africains, misant sur des partenariats stratégiques et des projets d’infrastructure à grande échelle. Face à cette stratégie, les puissances occidentales tentent de conserver leur influence, en proposant des programmes de coopération et en insistant sur la qualité, la durabilité et les valeurs partagées. Toutefois, la réactivité chinoise, sa capacité à investir rapidement et à financer des chantiers complexes, séduisent de nombreuses capitales africaines en quête de développement. L’Algérie ne fait pas exception, et les chiffres les plus récents confirment une domination nette des exportations chinoises sur son marché.
L’Algérie, vitrine de la percée chinoise
Avec 8,5 milliards de dollars de marchandises exportées vers l’Algérie en 2023, la Chine occupe près de 20 % du marché national, laissant loin derrière ses concurrents traditionnels. La France, premier partenaire commercial historique d’Alger, ne représente plus que 7,4 % des importations, tandis que l’Italie et le Brésil suivent de près. D’autres acteurs occidentaux comme l’Allemagne, les États-Unis ou le Canada, peinent à franchir la barre des 6 %, incapables de rivaliser en volume avec l’offensive commerciale chinoise.
Cette domination s’appuie sur une présence massive : 1.311 entreprises chinoises opèrent sur le territoire algérien, actives dans des secteurs variés allant du bâtiment à l’électronique, en passant par les énergies, les travaux publics et la distribution. L’efficacité de leurs interventions et leur capacité d’adaptation sont souvent mises en avant, leur permettant de décrocher d’importants contrats.
Investissements ciblés et accords multisectoriels
L’ampleur de l’engagement chinois s’est encore confirmée à l’occasion du récent forum algéro-chinois sur l’investissement. Huit accords majeurs ont été conclus à cette occasion, couvrant notamment l’agriculture, le secteur automobile, et les infrastructures. L’objectif affiché : renforcer l’ancrage économique dans le pays tout en diversifiant les domaines d’intervention.
L’ambassadeur chinois à Alger, Dong Guangli, a souligné l’importance stratégique de ces accords, dont la valeur dépasse les 8 milliards de dollars. Il a également mis en avant la volonté de son pays de construire une coopération « mutuellement bénéfique », dans un contexte où les besoins algériens en matière d’industrialisation, de mobilité et de transformation agricole ouvrent de larges perspectives de marché.
Cette stratégie permet à la Chine d’élargir progressivement son empreinte, tout en consolidant sa réputation de partenaire fiable et pragmatique. L’accent mis sur des projets concrets, souvent livrés rapidement, contraste avec la lenteur perçue des procédures occidentales, souvent encadrées par des normes administratives et éthiques jugées contraignantes par certains acteurs locaux.
Un rééquilibrage géopolitique assumé
Le choix de l’Algérie d’intensifier ses échanges avec la Chine ne s’inscrit pas uniquement dans une logique commerciale. Il reflète aussi une volonté plus large de diversifier ses partenaires, de rompre avec des dépendances anciennes et de s’ouvrir à d’autres modèles de coopération. En multipliant les partenariats avec Pékin, Alger cherche à affirmer sa souveraineté économique et à développer des marges de manœuvre dans un monde où les équilibres traditionnels sont remis en question.
Si les puissances occidentales conservent une influence culturelle et diplomatique notable, leur recul dans le champ économique algérien est désormais chiffré. La progression de la Chine ne relève plus de l’exception, mais d’une tendance lourde qui redéfinit la hiérarchie des puissances commerciales au Maghreb.