La bande de Gaza se dirige-t-elle vers un « scénario encore plus infernal » pour les civils, comme s’alarme l’Organisation des Nations unies (ONU) ? Engagée depuis le 27 octobre dans une offensive terrestre, l’armée israélienne y a, le 5 décembre, intensifié ses opérations contre les combattants du Hamas, ciblant désormais le sud du territoire palestinien, où des témoins ont fait étant de violents combats.
Des organisations internationales s’alarment des risques pour les civils à Gaza, où « tous les services de télécommunications » sont à l’arrêt, en raison « d’une coupure des principaux réseaux de fibre du côté israélien », selon le groupe de télécoms palestiniens Paltel.
« Un scénario encore plus infernal est sur le point de se réaliser, auquel les opérations humanitaires ne pourront peut-être pas répondre », a déclaré la Coordinatrice humanitaire de l’ONU pour les Territoires palestiniens, la Canadienne Lynn Hastings.
Le Sud pilonné
Depuis la reprise des combats le 1er décembre après sept jours de trêve, l’armée pilonne intensément le sud du territoire, faisant de très nombreux morts et blessés parmi les habitants de cette région et les civils venus s’y réfugier, pris au piège dans un périmètre de plus en plus restreint. Dans la nuit du 4 au 5 décembre, des témoins ont fait état de violents combats près de Khan Younès, nouvel épicentre des tensions, et de raids aériens vers Rafah, à la pointe sud du territoire.
Les militaires ont dit agir « avec force » à Khan Younès, où ils ont largué des tracts sur certains quartiers avertissant qu’« une terrible attaque était imminente » et ordonnant aux habitants d’en partir. Des dizaines de chars, de transports de troupes et de bulldozers israéliens sont entrés dans le sud du territoire palestinien, à proximité de Khan Younès, où s’entassent une partie des civils, ont indiqué des témoins.
L’agence palestinienne Wafa a par ailleurs fait état de « plusieurs » morts dans une frappe à Gaza-ville, plus au nord. Et tôt le 5, la branche armée du Hamas a annoncé avoir tiré une salve de roquettes vers Beersheva, grande ville du désert du Néguev.
Souffrances « intolérables »
La présidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Mirjana Spoljaric, arrivée le 4 décembre dans la bande de Gaza, a dénoncé, elle, les souffrances « intolérables » de la population. « Ce qui m’a le plus choqué, ce sont les enfants qui ont des blessures atroces et qui ont également perdu leurs parents et n’ont personne pour s’occuper d’eux », a-t-elle ajouté, soulignant que des civils « n’ont nulle part où aller ».
D’après l’ONU, 1,8 million de personnes, soit environ les trois quarts de la population totale de Gaza, ont déjà été déplacées par la guerre. « Nous avons vu ce qui s’est passé dans le nord de Gaza. Cela ne peut pas servir de modèle pour le sud », a renchéri depuis Le Caire, Ahmed Al-Mandhari, directeur régional de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
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Tsahal veut le « soutien » des ONG
Le patron de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, avait indiqué le 4 décembre avoir reçu une notice de l’armée israélienne, enjoignant l’organisation de « retirer » ses fournitures de son entrepôt médical dans le sud de la bande de Gaza dans les 24 heures, « car les opérations au sol le rendront inutilisable ». Mais l’organe de la Défense israélienne supervisant les activités civiles dans les territoires palestiniens (Cogat) a nié avoir demandé à l’OMS d’évacuer son entrepôt du sud de Gaza.
L’armée israélienne a toutefois demandé aux organisations humanitaires internationales leur « soutien » pour « aider à la mise en place des infrastructures » à Al-Mawasi, zone côtière du sud de la bande de Gaza, entre Khan Younès et Rafah, où Israël demande aux civils de se replier.
Deux tiers des morts sont des civils
Le ministère de la Santé du Hamas a affirmé en début de semaine que 15 899 personnes, à 70 % des femmes ainsi que des enfants et adolescents, ont été tuées depuis le début, le 7 octobre, des bombardements israéliens sur la bande de Gaza.
Environ deux civils ont été tués pour chaque combattant du Hamas mort dans la bande de Gaza, ont affirmé le 4 décembre de hauts responsables militaires israéliens, sous couvert d’anonymat. « Il faut espérer que ce ratio soit beaucoup plus bas dans la prochaine phase de la guerre », a indiqué un de ses responsables, ajoutant qu’un logiciel de cartographie de haute technologie avait été déployé pour tenter de réduire le nombre de morts parmi ceux qui ne combattent pas.
En Israël, l’attaque menée le 7 octobre par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza a fait 1 200 morts, en majorité des civils, selon les autorités. L’armée a annoncé le 5 décembre au matin le décès de trois de ses soldats la veille pour porter le bilan à 78 depuis le début de l’offensive terrestre.
D’après l’armée, 137 otages sont toujours retenus à Gaza, 105 ayant été relâchés pendant la trêve récente d’une semaine, dont 80 en échange de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël. Les efforts pour prolonger la trêve auraient échoué en partie parce que, selon un responsable américain, le Hamas ne voulait pas que des femmes otages révèlent ce qu’elles avaient subi, des accusations rejetées par le mouvement islamiste.
(Avec AFP)