Depuis sa création en 1960, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) s’est imposée comme un acteur central de l’équilibre énergétique mondial. Elle regroupe aujourd’hui treize membres : l’Algérie, l’Angola, la République du Congo, la Guinée équatoriale, le Gabon, l’Iran, l’Irak, le Koweït, la Libye, le Nigeria, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Venezuela. Ensemble, ces pays détiennent une part importante des réserves mondiales de brut et coordonnent leur production pour peser sur les prix. Leur influence s’est encore renforcée avec l’alliance dite OPEP+, qui inclut d’autres producteurs majeurs, dont la Russie. Ce bloc élargi agit souvent en cohérence pour contrôler l’offre et défendre les intérêts de ses membres face aux fluctuations du marché.
L’OPEP+ face aux ambitions américaines
Washington mise sur une stratégie simple : extraire davantage pour peser sur le marché mondial. Mais cette volonté se heurte à la mécanique bien rodée de l’OPEP+, où la Russie et l’Algérie jouent un rôle de plus en plus affirmé. En décidant d’ouvrir les vannes, ces pays défient directement les objectifs de Trump. L’enjeu est clair : avec un baril en dessous de 60 dollars, une grande partie des exploitations américaines deviennent peu ou pas rentables. D’après les experts du secteur, les seuils de rentabilité se situent aux alentours de 65 dollars. Si le prix chute durablement à 55 dollars, certaines exploitations pourraient tout simplement s’arrêter. Les conséquences ne se feraient pas attendre : destructions d’emplois dans les États producteurs, ralentissement des investissements dans les infrastructures, et remise en cause de la souveraineté énergétique que Trump souhaite afficher.
L’approche choisie par Moscou et Alger ne vise pas uniquement à défendre leurs revenus. Elle marque également une réponse politique à la rhétorique offensive du président américain. En multipliant les déclarations appelant à “produire sans limite”, Donald Trump s’est attiré l’attention des principaux pays producteurs, qui préfèrent peser sur l’offre mondiale pour maintenir un équilibre à leur avantage. L’Algérie, fidèle à sa position au sein de l’OPEP, s’aligne sur une logique de revenus stables, tandis que la Russie joue un double jeu : maintenir ses parts de marché tout en participant à une stratégie coordonnée de régulation.
Des pompes pleines, un secteur sous tension
Pour le consommateur américain, la baisse des cours se traduit par des prix plus bas à la pompe. Mais cet avantage immédiat masque un risque plus large pour l’économie nationale. Les producteurs locaux, déjà soumis à des charges élevées, peinent à s’adapter à un contexte où le brut se négocie sous leur seuil de rentabilité. L’équilibre fragile sur lequel repose le secteur énergétique américain pourrait vaciller si les prix demeurent trop bas. En parallèle, les déclarations de l’administration Trump et les choix de l’OPEP+ ne laissent présager aucun compromis rapide.
Ce bras de fer met en lumière un paradoxe : les États-Unis, premier producteur mondial de pétrole, ne maîtrisent pas les leviers clés du marché. Ils dépendent des décisions prises à Alger, Riyad ou Moscou, où la stratégie est mûrement réfléchie et fondée sur des objectifs économiques mais aussi géopolitiques. À travers la pression sur les prix, les grandes capitales productrices rappellent que l’indépendance énergétique américaine reste une ambition fragile, soumise aux dynamiques internationales.
Alors que Donald Trump continue d’affirmer sa volonté de dominer le secteur énergétique mondial, la réaction de pays comme la Russie et l’Algérie démontre que les rapports de force restent mouvants. Ce jeu d’équilibre complexe pourrait bien décider de la solidité ou non de la politique énergétique américaine dans les mois à venir.