Publié le 29 avril 2025
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L’organisation de recherche a axé ses travaux sur les groupes islamistes présents dans le bassin du lac Tchad et dans la zone dite des « trois frontières ». Ce mardi 29 avril, une étude a été publiée par le Conflict Armament Research (CAR) et permet de mieux comprendre d’où proviennent les armes utilisées par les jihadistes au Sahel.
Constat : la majorité d’entre elles viennent directement de la région, dans une démarche opportuniste, s’appuyant sur les dynamiques locales et les contraintes logistiques.
• Du matériel pillé aux armées nationales
Les enquêteurs du CAR ont été en mesure de répertorier 726 armes saisies auprès de groupes jihadistes dans le Sahel central entre 2014 et 2023. « Les autorités nationales [les] ont récupérées lors de 131 saisies distinctes au Burkina Faso, au Mali et au Niger », indique le rapport.
Les chercheurs ont constaté que la plupart étaient similaires. Ces groupes « exploitent généralement le matériel déjà disponible dans leurs zones d’opérations, notamment à travers des attaques contre des positions des forces de défense et de sécurité ». D’après les conclusions de CAR, environ 20 % de ces arsenaux proviennent directement des stocks des armées nationales sahéliennes.
Un chiffre probablement sous-estimé selon Léo Jarry, co-auteur de cette publication. Si les deux plus influents groupes jihadistes de la région, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM) et l’État islamique au Sahel (EIS), sont affiliés respectivement à Al-Qaïda et à l’État islamique, « il ne semble cependant pas y avoir de preuves [qu’ils] puissent accéder directement à des armes en dehors du Sahel central », assure ce bilan. « Ce sont des acteurs très locaux et très opportunistes », précise de son côté Léo Jarry.
« Plus ils saisissent des armes, plus ils attaquent des avant-postes [des armées], plus leur capacité à continuer de le faire augmente de façon exponentielle », détaille Matthew Steadman, co-auteur de l’étude qui souligne un « cercle vicieux ».
• Des fusils d’assaut vieux de plusieurs décennies
Selon CAR, la plupart des armes saisies sont « de type militaire ». Dans les deux régions concernées, ces fusils d’assaut sont généralement de fabrication chinoise ou russe : ils représentent 78 % de l’arsenal dans le Liptako-Gourma et 85 % autour du lac Tchad. Ils ont été produits en particulier dans les années 1960 et 1970. Ceux fabriqués après la chute du régime libyen en 2011 ne représentent qu’un très faible pourcentage.
En plus des pillages provenant des forces de sécurité des pays de la région, les groupes jihadistes s’appuient donc aussi sur du matériel de combat « hérité » de conflits antérieurs en l’achetant sur « des marchés illicites ». Comme le constate le rapport, les années 2011-2012 correspondent à la période où Mouammar Kadhafi est tombé, mais aussi à la rébellion qui s’est intensifiée dans le nord du Mali, « deux crises sécuritaires au cours desquelles de grandes quantités d’armes ont été détournées des stocks gouvernementaux ».

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Reste que les chercheurs relativisent : « seulement 7 % des armes salafistes jihadistes répertoriées proviennent des stocks de la Jamahiriya [Libye]. » Et leur approvisionnement ne se fait pas sur des circuits de longue portée mais « vraisemblablement sur des marchés clandestins locaux ».
• Le drone, nouvel outil pour les jihadistes
Au-delà des fusils d’assaut et d’artillerie saisies lors d’attaques contre les armées nationales, les groupes jihadistes sahéliens s’orientent de plus en plus vers l’utilisation militaire de drones civils. Ils transforment désormais ces petits appareils en y ajoutant une charge explosive, qu’ils lancent contre des positions militaires.
En mars dernier, l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP), avait revendiqué une attaque de ce genre contre des troupes camerounaises déployées dans des opérations antijihadistes à Wulgo, au Nigeria. L’armée camerounaise a reconnu 12 morts, mais des sources locales à l’AFP font état d’un bilan plus lourd. Après l’attaque, l’ISWAP a publié des images d’armes saisies, dont des drones camerounais, qui pourront être réutilisés ensuite dans d’autres attaques.
(Avec AFP)