Liée depuis longtemps à l’Algérie par des relations économiques héritées de l’histoire coloniale, la France voit aujourd’hui sa position de partenaire privilégié remise en question. Pendant des années, de nombreux projets industriels ou d’infrastructures ont associé les deux pays, portés par une proximité linguistique, juridique et institutionnelle. Mais cette relation semble se déliter, à mesure que les priorités économiques d’Alger évoluent et que les divergences politiques s’accentuent. Plusieurs négociations récentes entre entreprises françaises et algériennes ont été interrompues, sans reprise annoncée.
Diversification stratégique vers l’Asie
L’Algérie réoriente activement sa politique de partenariats. L’accent est mis sur des pays d’Asie comme la Chine, la Corée du Sud ou la Malaisie, ainsi que sur la Turquie. Cette orientation repose sur des critères de réactivité, de maîtrise technique et de clarté dans l’exécution. Selon le club économique algérien, les relations historiques ou culturelles ne suffisent plus à justifier des coopérations commerciales : les entreprises locales recherchent avant tout des partenaires capables d’accompagner rapidement leurs projets.
La Chine s’impose comme l’un des nouveaux interlocuteurs majeurs. À l’occasion d’un forum à Alger, huit accords ont été signés entre entreprises chinoises et algériennes, en particulier dans l’industrie automobile. Des marques comme Chery, Omoda ou Jetour envisagent une implantation durable, avec production locale et transferts de compétences. Pour les autorités économiques, cette approche répond de manière concrète aux besoins nationaux en matière d’équipement et d’industrialisation.
Perte d’attractivité des offres françaises
Les conditions proposées par les entreprises françaises sont perçues comme de moins en moins compétitives. Le manque de flexibilité, la lourdeur des procédures, ainsi que les délais de mise en œuvre sont régulièrement mis en cause par les opérateurs algériens. Plusieurs projets ont été suspendus, notamment dans les secteurs industriels et logistiques, sans perspectives de relance immédiate.
Cette évolution commerciale coïncide avec une dégradation notable des relations diplomatiques entre Alger et Paris. Depuis l’été 2024, les tensions se sont multipliées : la reconnaissance par la France du plan marocain pour le Sahara occidental, l’arrestation de l’écrivain Boualem Sansal en Algérie, ou encore l’affaire impliquant un agent consulaire algérien soupçonné d’enlèvement, ont ravivé les crispations. Ces épisodes ont conduit à des rappels d’ambassadeurs et à des expulsions croisées de diplomates.
La concomitance de ces incidents politiques avec le désengagement économique progressif de la France interroge. Si aucune décision officielle ne lie directement ces deux dynamiques, certains observateurs se demandent si les difficultés diplomatiques ne pèsent pas indirectement sur la coopération commerciale. Les autorités algériennes, en tout cas, affichent une volonté claire de réévaluer leurs partenariats sur des critères d’efficacité, laissant en retrait les acteurs jugés peu adaptés aux nouvelles exigences du pays.