Le 28 février 2025, Donald Trump, récemment revenu à la présidence, et son vice-président JD Vance accueillaient Volodymyr Zelensky pour un entretien censé renforcer les liens bilatéraux. Ce qui devait être une discussion stratégique autour du soutien américain et des projets communs sur les ressources naturelles s’est transformé en une scène tendue. Trump, appuyé par Vance, avait reproché à Zelensky une attitude jugée insuffisamment reconnaissante face aux aides américaines, allant jusqu’à conditionner le dialogue à une acceptation d’un cessez-le-feu avec Moscou. Zelensky, refusant de céder à la pression, avait réclamé des garanties sécuritaires sérieuses avant tout compromis, rappelant que toute promesse de la Russie restait entachée de méfiance. L’entrevue s’était soldée par un départ sans poignée de main, révélant un profond malaise diplomatique.
Un partenariat économique à défaut d’un accord militaire
Malgré cet épisode glacial, les deux parties ont finalement trouvé un terrain d’entente – non pas sur les armes ou les cessez-le-feu, mais sur l’économie. Un accord de coopération, signé le mercredi suivant, a posé les bases d’un partenariat axé sur l’accès aux ressources naturelles ukrainiennes. Financé par un fonds d’investissement américain, ce pacte prévoit le développement de projets dans les domaines de l’extraction minière, pétrolière et gazière. Contrairement à certaines rumeurs, il n’impose aucune dette à l’Ukraine et ne concerne pas l’aide militaire déjà versée. Les termes sont clairs : les ressources appartiennent intégralement à l’État ukrainien, qui reste seul maître de leur exploitation. Autrement dit, si les États-Unis obtiennent un droit d’accès à ces richesses, la souveraineté ukrainienne sur son sous-sol n’est nullement entamée.
Cette précision, martelée par la ministre ukrainienne de l’Économie, Ioulia Svyrydenko, vient répondre à certaines critiques internes qui voyaient dans cet accord une porte ouverte à une forme de néocolonialisme économique. Le ministre américain des Finances, Scott Bessent, a qualifié l’accord d’« historique », soulignant qu’il ne s’agissait pas seulement de reconstruction mais d’un engagement durable pour dynamiser l’économie ukrainienne.
Entre dépendance énergétique et indépendance stratégique
Derrière les chiffres et les signatures se joue une équation bien plus complexe. Pour l’Ukraine, en guerre depuis trois ans, reconstruire son tissu économique sans perdre le contrôle de ses ressources est une priorité vitale. Pour les États-Unis, investir dans l’Ukraine représente un levier stratégique face à la Russie, mais aussi une occasion de renforcer leur influence en Europe de l’Est sans s’engager davantage sur le plan militaire.
Ce partenariat peut être vu comme un compromis : en l’absence de garanties sécuritaires exigées par Zelensky – que Trump et son administration n’ont pas voulu accorder – l’économie devient le théâtre principal de la coopération. Washington ne promet plus d’armes, mais propose des capitaux. Kiev, de son côté, ouvre ses portes aux investissements, tout en traçant une ligne rouge sur la question de sa souveraineté.
Ce glissement du soutien militaire vers une collaboration économique laisse entrevoir un changement de doctrine dans les relations américano-ukrainiennes. Alors que Kiev maintient son cap vers une adhésion à l’Union européenne et une réforme de ses institutions, cet accord montre que les alliances de demain ne reposeront pas uniquement sur les blindés ou les missiles, mais sur les contrats, les minerais et les politiques énergétiques.
Un accord à double tranchant pour l’Ukraine
Si le gouvernement ukrainien assure que ce partenariat respecte les principes constitutionnels du pays, certains analystes estiment que l’absence de contreparties sécuritaires pourrait être problématique. En renonçant, au moins pour l’instant, à obtenir des garanties fermes contre de nouvelles agressions russes, Kiev prend un pari : que les investissements suffiront à renforcer son économie et, indirectement, sa résilience militaire.
L’équilibre est fragile. Dans une région où les alliances peuvent se transformer en rivalités, chaque signature doit être pesée à l’aune de sa répercussion géopolitique. L’accord avec les États-Unis pourrait encourager d’autres puissances économiques à participer à la reconstruction de l’Ukraine, mais il pourrait aussi irriter Moscou, qui y verra un renforcement du lien entre Kiev et l’Occident, même sous une forme strictement économique.
Au final, cet accord, bien que focalisé sur les ressources, n’est pas anodin. Il marque le retour d’un dialogue entre deux pays aux visions souvent divergentes sur la guerre, mais unis par un besoin commun : trouver des solutions tangibles au-delà des discours diplomatiques. Et dans cette nouvelle phase, l’Ukraine entend bien rester maîtresse de ses choix comme de ses richesses.