Le cancer du col de l’utérus reste l’un des rares cancers dont l’origine infectieuse est clairement identifiée aujourd’hui : le papillomavirus humain (HPV). Transmis essentiellement par voie sexuelle, ce virus touche une grande majorité de la population à un moment ou un autre de la vie. Pourtant, il continue de faire des ravages, en silence, alors même que des moyens de prévention efficaces existent.
Le HPV est un virus ubiquitaire. Environ 80 % des hommes et des femmes y seront exposés au cours de leur vie. Dans l’immense majorité des cas, l’infection disparaît spontanément, éliminée par le système immunitaire. Mais chez certaines femmes, notamment lorsqu’il s’agit de souches à haut risque, le virus peut s’installer durablement au niveau du col de l’utérus.
Cette persistance peut entraîner l’apparition de lésions précancéreuses. Sans dépistage ni prise en charge, ces lésions peuvent évoluer lentement vers un cancer du col de l’utérus, souvent diagnostiqué tardivement dans les contextes à faibles ressources.
Un cancer évitable grâce à la vaccination… mais sous-utilisée
Le paradoxe est douloureux : ce cancer est évitable dans la majorité des cas. Un vaccin sûr et efficace existe contre les principaux types de HPV à l’origine de ces lésions. Recommandée pour les filles et les garçons dès l’adolescence, la vaccination pourrait à terme éradiquer ce cancer évitable. Mais les taux de couverture vaccinale restent très insuffisants, notamment en Afrique, en Asie et dans plusieurs régions du monde où les tabous autour de la sexualité et le manque d’accès à l’information freinent la prévention.
La communication autour du HPV reste encore trop souvent axée uniquement sur les femmes. Pourtant, les hommes sont les principaux vecteurs du virus. Asymptomatiques dans la majorité des cas, ils transmettent le virus sans le savoir. Ne pas les intégrer dans les campagnes de vaccination et de sensibilisation constitue une erreur stratégique majeure.
Protéger les femmes commence aussi par impliquer les hommes. Une vaccination généralisée, incluant les garçons, constitue un levier essentiel pour briser la chaîne de transmission.
Un outil simple, mais encore trop peu accessible
Outre la vaccination, le dépistage régulier par frottis cervico-utérin (ou test HPV) reste l’arme la plus efficace pour prévenir l’évolution vers un cancer. Ce geste médical, rapide et indolore, permet de repérer les anomalies bien avant qu’elles ne deviennent graves. Pourtant, dans de nombreuses régions, l’accès au dépistage est encore limité, entravé par le manque d’infrastructures, de personnel formé, ou par la persistance des tabous.
Derrière chaque cas de cancer du col de l’utérus évitable, il y a une occasion manquée de prévention. Briser le tabou, c’est aussi parler de sexualité sans détour, promouvoir une vaccination égalitaire, renforcer les campagnes d’information, et garantir l’accès au dépistage. Ce n’est pas qu’un « problème de femmes ». C’est une responsabilité collective, un enjeu de santé publique qui appelle à une mobilisation des autorités sanitaires, des acteurs communautaires, des familles, mais aussi des hommes. Car en matière de prévention, le silence peut être mortel.