Créé en 1970, le jardin botanique et zoologique Edouard Adjanohoun, du nom du premier recteur de l’Université nationale du Bénin (Unb), demeure un site d’attraction et de pédagogie.
C’est un poumon vert, encore peu connu de milliers d’étudiants et autres usagers de la plus grande université du Bénin. Beaucoup entretiennent encore le mythe autour de ce jardin botanique et zoologique, jusqu’à ce qu’ils découvrent la réalité au cœur de cette biodiversité étendue sur 15 hectares. Etudiante en deuxième année, Estelle Dokpo y a mis pieds pour la première fois ce samedi 21 mai 2022. « Le Jardin botanique est immense et très vert. J’ai découvert un environnement calme, doux et diversifié. Il y a beaucoup de choses qui m’y ont émerveillée, surtout ce paysage très rare qu’on aura de difficultés à retrouver dans nos villes », confie-t-elle.
Vent, bruits de branches, grimaces de singes et chants d’oiseaux. Dans cette forteresse à ciel ouvert, l’atmosphère est unique et sensationnelle. Des plantes, on y trouve de toutes les formes, de toutes les tailles et de toutes les couleurs. Certains usagers saisissent l’opportunité pour se relaxer ou méditer au milieu de la flore. D’autres, concentrés sur leurs ordinateurs ou devant leurs bouquins, profitent du calme pour travailler. « Je suis fréquent dans ce jardin parce que la nature y est conservée.
C’est tout le contraire de l’atmosphère qu’on a en ville, avec des bruits et des bouffées de chaleur. Ici, c’est plus calme et frais pour réfléchir », témoigne le chercheur Félix Mpo N’tcha, qui prend son temps pour lire un document volumineux. L’agronome Apollinaire Hounsavi préfère ce sanctuaire aussi pour être proche de la nature. « Ça m’inspire beaucoup. En tant qu’agronome, je me retrouve dans mon milieu», fait-il remarquer.
L’œuvre d’une vie !
Edouard Adjanohoun, créateur de ce jardin, a une réputation internationale. Premier botaniste noir, il a laissé ses empreintes un peu partout dans le monde: professeur de botanique et de biologie végétale à l’Université de Bordeaux III (1976-1990), vice-président du Conseil scientifique africain, président du Comité interafricain de l’Union africaine pour la médecine traditionnelle et les plantes médicinales africaines en 1988, recteur honoraire de l’Université nationale du Bénin, titulaire de la chaire de botanique en 1982, etc.
Ce scientifique est auteur de plus de 200 travaux scientifiques dans les domaines de la botanique, de l’ethnobotanique, de l’écologie végétale, de la phytosociologie, de la gestion et de la conservation des ressources phylogénétiques. Edouard Adjanohoun a donc mis toute son énergie dans les plantes et dans ce jardin, avant son décès en janvier 2016.
Aujourd’hui, l’espace qu’il a aménagé et qui porte son nom ne procure pas que des sensations. Il regorge d’une biodiversité incroyable. Le conservateur des lieux, Dr Onodjè Pierre Agbani, dévoile la richesse de ce jardin sous tutelle du Centre pilote régional de la biodiversité africaine (Cenprebaf). « Nous avons environ 880 espèces ligneuses et herbacées, dont 176 espèces exotiques.
On retrouve ici beaucoup d’espèces ornementales, des bassins aux plantes aquatiques et semi-aquatiques, des espèces de mangroves. Il y a une ombrière en « L » dont chaque aile s’étend sur 40 m x 8 m et abrite des espèces sciaphiles (orchidées, fougères et autres espèces menacées)», explique le botaniste. Le monde animal est aussi présent dans le jardin. Une massue de quarantaine permet d’adapter les animaux aux nouvelles conditions de vie au jardin. Un sepentorium abrite les serpents à 3 m de profondeur.
Un modèle à dupliquer
Des varans, tortues et crocodiles prennent également place dans cet environnement singulier. De nombreuses autres espèces animales en liberté ou en captivité, comme les oies et les antilopes se font remarquer. Selon le chef service du Jardin botanique et zoologique Edouard Adjanohoun, ce refuge de la biodiversité vieux de plus de cinq décennies attend de faire sa mue pour accrocher davantage les amis de la faune et de la flore.
« Nous allons finaliser la monographie (flore et faune illustrées) du jardin, construire les habitats spécifiques pour les diverses espèces animales, acquérir de nouveaux équipements, de divers jeux et poursuivre les aménagements spécifiques. Dans le même temps, nous allons accroître la production de pépinières pour la promotion des espèces ornementales et sylvicoles locales et continuer les introductions/ enrichissement de la diversité biologique du jardin», rassure Dr Pierre Agbani, le conservateur.
En attendant, le Jardin botanique et zoologique Edouard Adjanohoun est un modèle de conservation dont rêvent beaucoup d’usagers pour les villes. « On devrait avoir de pareils jardins sur toute l’étendue du territoire national. Chaque commune se doit de promouvoir des poumons verts», préconise Félix Mpo N’tcha. Ce n’est sans doute pas encore tard.