Kouadio Konan Bertin quitte le ministère de la Réconciliation et de la Cohésion nationale, le 20 octobre 2023. © FACEBOOK KOUADIO KONAN BERTIN
Publié le 25 octobre 2023
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L’appel téléphonique scellant son sort l’a quelque peu pris de court. Kouadio Konan Bertin – dit KKB – a appris son limogeage de la bouche même du vice-président ivoirien, Tiémoko Meyliet Koné, le 15 octobre, la veille de la nomination de Robert Beugré Mambé, successeur surprise de Patrick Achi à la primature, et deux jours seulement avant que la composition du nouveau gouvernement ne soit rendue publique.
« Inoubliable marque de confiance »
Son ministère de la Réconciliation nationale et de la Cohésion nationale disparaît. Le portefeuille de la Cohésion nationale a été confié à Myss Belmonde Dogo, qui sera également chargée de la Solidarité et de la Lutte contre la pauvreté.
KKB a profité de la cérémonie de passation de pouvoir, le 20 octobre, pour « témoigner [sa] profonde gratitude au chef de l’État pour [l’]inoubliable marque de confiance » [qu’il lui a accordée]. « Le président m’a permis de vivre l’expérience gouvernementale pendant trois ans, ce n’est pas rien », confie-t-il à Jeune Afrique. Ce poste de ministre, l’ambitieux quinquagénaire en avait toujours rêvé, quitte à s’émanciper du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), dont il dirigea la section Jeunesse de 2003 à 2013.
Lors de la présidentielle de 2020, il avait maintenu sa candidature en indépendant face à Alassane Ouattara, tandis que l’opposition, qui contestait la constitutionnalité du troisième mandat du chef de l’État sortant, faisait bloc et boycottait le scrutin. Tout au long de la campagne, KKB avait été accusé de servir de faire-valoir à la majorité, voire d’être le « partenaire de combat » de Ouattara. Il ne récoltera que 1,99% des suffrages, sera exclu du PDCI pour « atteinte à l’unité et aux intérêts du parti », mais obtiendra un ministère.
« Ouattara compatible »
Cet acte de rébellion n’était pas le premier. Déjà, en 2013, Henri Konan Bédié, qui dirigea le PDCI pendant trois décennies, avait qualifié KKB de « soldat perdu » car ce dernier avait prôné un renouvellement générationnel au sein de la plus ancienne formation politique du pays. Deux ans plus tard, le « soldat » se lancera dans la bataille présidentielle – déjà en indépendant – et récoltera moins de 4% des voix, avant de rentrer dans le rang. « Le PDCI, c’est ma maison », affirme-il aujourd’hui. À une nuance près : « Je suis PDCI-RDA, Ouattara compatible ».
Son limogeage, alors que la grande majorité des ministres ont été reconduits, ne signifie ni la fin de son activité politique ni une prise de distance avec la majorité. Ce week-end, plusieurs ministres sont d’ailleurs venus à son domicile lui témoigner leur « amitié ».
« Je n’ai pas d’amertume, bien au contraire. Je pars le cœur léger. La Côte d’Ivoire se développe. C’est un énorme bonheur d’avoir contribué au bilan du chef de l’État, qui est aussi le mien. Je reste à sa disposition », assure-t-il. Malgré les accusations de viol visant son ministre, en 2021, Alassane Ouattara lui avait maintenu sa confiance.
Cure de silence
L’ancien député de Port-Bouët (2011-2016), qui n’a plus aucun mandat électoral, affirme qu’il compte prendre du « repos » et se donner un temps de « réflexion ». Regagnera-t-il la « maison PDCI » ? « Il faut [qu’il fasse] une demande et on verra », avait récemment affirmé le porte-parole du parti. Peut-il créer sa propre formation politique ? KKB refuse d’en parler et même de préciser combien de temps durera sa cure de silence. Seule certitude, le « soldat perdu » n’a pas rendu les armes.